• Le blog anod1

    Qui êtes-vous?

    Un passionné, un nécessiteux (à la recherche d’un travail, bien évidemment), un curieux, un besogneux, un paresseux, un peureux, un acheteur, un fouineur, un malin, un névrosé, un dépressif, … Mais, bien évidemment, je ne vais pas m’éterniser dans cette liste qui pourrait finir par s’avérer ennuyeuse autant qu’incomplète, car je ne sais pas qui vous êtes.

    (Pardonnez-moi, mesdames, mesdemoiselles, pour le masculin prédominant, mais j’applique tout simplement la règle de grammaire nécessaire, car je m’adresse en toute simplicité à l’être humain qui est en vous!)

    Mais, trêve de plaisanterie, revenons-en à nos moutons.

    Qui êtes-vous?

    Possédez-vous un ordinateur? Êtes-vous branché sur le net?

    En effet, il se trouve que le monde d’aujourd’hui est partagé en deux catégories : les connectés et les non connectés.

    Et le monde est cruel:

    Si vous n’êtes pas connectés, vous aurez de plus en plus de mal à vivre correctement, vous n’aurez plus accès au travail, et, qui plus est, vous finirez par ne plus pouvoir aller voter si vous ne savez pas vous servir de ces satanées machines que sont les ordinateurs.

    Si vous êtes connectés, certes, la vie vous sera facilitée, mais d’autres inconvénients se profileront à l’horizon. Vous ne pourrez plus vous en passer; et, comble de malheur, une coupure d’électricité, un virus, un piratage de carte bleue et c’est la panique, si vous n’avez pas pris vos précautions.

    Mais il y a pire encore!

    Laissez-moi vous conter une petite histoire qui pourrait bien s’avérer être, dans quelques années, la pire fin de l’humanité :

    Monsieur Arthur Node, quinquagénaire célibataire, se retrouve au chômage pour la énième fois en cette année deux mille quatre. Les temps sont durs, les sociétés se délocalisent et licencient à tour de bras. De son métier de cadre dans le secteur des ressources humaines, il est passé à agent de sécurité, puis préparateur de commandes, et même manutentionnaire ; que des petits boulots suffisant tout juste pour vivre à peu près décemment. Sa qualification ne lui sert plus à rien, de nos jours on ne recrute plus. De plus il avance en âge, il n’intéresse plus personne.

    Son petit deux pièces, en plein cœur de Paris, lui revient trop cher ; tous les jours, il se creuse la tête pour trouver une solution. Un soir, au bord du désespoir, il décide d’aller se soûler dans le bistrot du coin.

    Par un hasard heureux, s’il en est, il y rencontre une ancienne connaissance de travail, un certain Pierre Ponce, devenu responsable de com-munication. Celui-ci a l’air en forme, quoiqu’un peu amaigri.

    D’un naturel prétentieux, il s’enquiert brièvement de la santé et de la situation de son ex-collègue, et lui narre, aussitôt, son propre parcours: la réussite. Ancien chef de service, il a opté pour une reconversion dans la communication par l’informatique. Bien lui en a pris, fini le chômage, depuis son salaire a augmenté, il économise sur le transport grâce aux visioconférences, il économise sur ses achats en commandant par le net, il économise son temps et son argent, …

    Son enthousiasme exubérant et son moral d’acier accablent Arthur. Mais, ne s’attardant pas sur son propre échec, plus admiratif qu’envieux, celui-ci saute sur l’opportunité, et, s’enquière, auprès de Pierre, des conditions et possibilités de réintégrer la vie active grâce à ces nouveaux outils de communication, dont il n’avait jamais soupçonné l’importance du développement.

    Enhardi par les arguments en bétons de son nouvel ami, et, qui plus est, bardé de conseils, d’adresses et de tuyaux, Arthur se précipite vers un nouveau lendemain. Après quelques temps, et moult investigations, ordinateur, webcam, imprimante, portable et bien d’autres, font leur entrée dans le modeste appartement de leur nouveau propriétaire.

    Tous ces efforts et investissements portent enfin leurs fruits, au bout de quelques semaines, formation oblige, notre ami trouve du travail. La joie le submerge, il revit, finie la galère, il redevient un être humain digne de ce nom, il fait de nouveau parti de la norme, et n’a plus à avoir honte.

    Et, il va, ainsi,  de découverte en découverte. Avec le net, le monde est à sa porte, et il s’y précipite. Ne prenant plus le temps de faire ses courses, il les commande et paye en ligne, le livreur lui porte à domicile.

    Il en vient à tout faire par le net : le travail, les achats, les rencontres, les démarches administra-tives ; il crée son avatar et vit une autre vie au sein d’une ville virtuelle où il fait de multiples rencontres en 3D. Il va jusqu’à faire l’amour par le net, et ne sort presque plus de chez lui.

    De jour en jour, son corps s’affaiblit, il maigrit, son teint devient blafard, il ne voit d’ailleurs plus ses voisins, auxquels il vantait sa nouvelle vie et sa réussite.

    Ces derniers, influencés par l’enthousiasme d’Arthur, avaient tous investi dans un ordinateur et s’étaient branchés sur le net. La cage d’escalier de notre ami devenait de plus en plus calme, si ce n’était les allées et venues des livreurs qui se faisaient de plus en plus nombreuses. Ceux-ci, fatigués de sonner à des portes qui tardaient de plus en plus à s’ouvrir, finirent par déposer les paquets devant les entrées, d’autant qu’ils étaient tous payés.

    Mais, ce petit manège n’intéressait pas notre Arthur, trop absorbé qu’il était à se fonder une famille, (sans les charges),  et un vaste réseau d’amis par le biais du travail, des chats et des jeux en lignes.

    Il créa un forum et un blog, qui devint sa maison virtuelle,  il y retrouvait tout son petit monde  et même ses voisins, avec qui il buvait des cafés, la vie était bien plus simple, les cris étaient silencieux, on ne lui coupait jamais la parole, il pouvait avoir plusieurs amours et pas de jalousie, et tellement de sensations nouvelles qu’ils ne connaissaient pas, il était libre…

    Il mit toute son âme dans ce blog qu’il nomma Anod1,  il ne pouvait plus s’en passer c’est tout juste s’il prenait le temps de manger.

    Tant et si bien que son corps affaibli à l’excès finit par le trahir, son cœur le lâchait, il sut qu’il allait mourir seul devant son ordinateur, la main crispée sur la souris, les yeux rivés sur l’écran dans l’attente d’un bonheur improbable, il en était presque heureux, la vie en avait enfin assez de lui.

    Mais dans ce moment des derniers instants l’évidence de sa solitude aveugla d’amertume sa conscience, son délire solitaire s’abîma dans un dernier sursaut de haine : “je vous maudis tous, vous qui passez par ici, maudit Anod1… vous resterez ici … maudit Anod1 … maudit Anod1 … maudit Anod1 …maudiiiiit … AAAAArrgghhh … rrraaa …..!

    Et depuis ce jour tous ceux qui s'aventurent dans les pages du blog Anod1 finissent par ne plus ouvrir leur porte et boivent des cafés pour l'éternité...............

    Dans l'antre d'Arthur les âmes s'accumulent pour le plus grand  plaisir de son âme perdue...

     

     

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